L'opposant Vladimir Kara-Mourza a été condamné lundi 17 avril par un tribunal de Moscou à 25 ans de prison à l'issue d'un procès emblématique de la répression tous azimuts en Russie contre ceux qui s'opposent à l'offensive du Kremlin en Ukraine.
Vladimir Kara-Mourza, proche de l'opposant de premier plan Boris Nemtsov assassiné en 2015, était l'un des derniers critiques du Kremlin à ne pas être derrière les barreaux ou exilé à l'étranger.
À l'issue d'un procès à huis clos, le tribunal a annoncé qu'il reconnaissait M. Kara-Mourza coupable de "haute trahison", de diffusion de "fausses informations" sur l'armée russe et de travail illégal pour une organisation "indésirable", selon une journaliste de l'AFP.
L'Union européenne a condamné une peine "scandaleusement sévère". Berlin a dénoncé avec "la plus grande fermeté" la condamnation tandis que Londres a fustigé une "condamnation politiquement motivée".
Le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme Volker Türk a demandé la libération "sans délai". "Personne ne devrait être privé de sa liberté pour avoir exercé ses droits humains, et j'appelle les autorités russes à le libérer sans délai. Tant qu'il est détenu, il doit être traité avec humanité et respect de sa dignité", a-t-il indiqué dans une déclaration envoyée aux médias.
"J’en suis fier"
En conséquence, il a été condamné à une peine cumulée de 25 ans d'emprisonnement dans une colonie pénitentiaire à régime sévère, ce qui implique des conditions d'incarcération plus strictes. Soit ce qu'avait requis le Parquet.
Menotté dans la cage dévolue aux accusés, et vêtu d'un jean bleu, d'un t-shirt noir et d'une veste grise, l'opposant âgé de 41 ans a accueilli le verdict avec un sourire, avant d'enjoindre par des gestes ses soutiens à lui écrire en prison.
Citée par les agences de presse russes, l'une de ses avocats, Maria Eismont, a annoncé que M. Kara-Mourza allait faire appel, dénonçant des "violations grossières de procédure" lors du procès.
Lors de ses dernières déclarations le 10 avril, Vladimir Kara-Mourza s'était dit "fier" de son engagement politique : "Non seulement je ne me repens pas de tout cela, mais j'en suis fier", avait-il lancé selon des propos publiés par le journaliste Alexeï Venediktov.
"Je sais aussi qu'un jour viendra où les ténèbres qui recouvrent notre pays se dissiperont (...) quand ceux qui ont instigué et déclenché cette guerre (en Ukraine) seront qualifiés de criminels, et non ceux qui ont essayé de l'arrêter", avait encore dit l'opposant.
"Fausses informations"
En détention provisoire depuis avril 2022, M. Kara-Mourza a failli mourir après avoir été, selon lui, empoisonné à deux reprises, en 2015 et 2017, des tentatives d'assassinat qu'il attribue au pouvoir russe.
Selon l'un de ses avocats, Vadim Prokhorov, l'opposant souffre de polyneuropathie et de pathologie neuromusculaire, conséquence des deux empoisonnements.
D'après l'agence de presse russe TASS, l'opposant, qui a été déclaré "agent de l'étranger" par les autorités, était accusé de "haute trahison" pour avoir critiqué le pouvoir dans des interventions publiques en Occident.
M. Kara-Mourza a notamment plaidé aux États-Unis, en Europe et au Canada pour l'adoption de sanctions contre les responsables russes se rendant coupable de graves violations des droits humains, à l'instar de la "loi Magnitski" votée en 2012.
L'opposant a aussi travaillé pour l'organisation Open Russia de l'ex-oligarque en exil et détracteur du Kremlin Mikhaïl Khodorkovski, déclarée "indésirable" par les autorités russes en 2017.
Source: France 24