La Première ministre britannique, Liz Truss, a rejeté, mercredi, les appels à la démission venant de l'opposition travailliste, après le revirement spectaculaire de son gouvernement sur le budget et la fiscalité. Pour tenter de calmer la tempête économique et politique, elle a dû nommer un nouveau ministre des Finances.
Sous un feu nourri d'attaques après avoir dû abandonner son programme économique, la Première ministre britannique Liz Truss s'est défendue, mercredi 19 octobre, au Parlement, assurant qu'elle était une "battante, pas quelqu'un qui abandonne".
Rejetée par l'opinion, contestée au sein de sa propre majorité, la dirigeante conservatrice est déjà en sursis six semaines après son entrée à Downing Street. Sortie jusqu'alors de son silence uniquement pour s'excuser sur la BBC après l'humiliant renoncement aux baisses d'impôts promises, elle affrontait un test majeur lors du rendez-vous hebdomadaire des questions au Parlement.
"Je suis préparée à faire face, je suis prête à prendre les décisions difficiles", a-t-elle affirmé.
Très combative, elle a cherché autant à défendre sa politique face aux huées et aux appels à la démission de l'opposition travailliste qu'à convaincre les rangs conservateurs de sa capacité à rester à Downing Street.
"À quoi sert une Première ministre dont les promesses ne tiennent même pas une semaine?", a asséné sans ménagement le chef de l'opposition travailliste Keir Starmer, énumérant toutes les mesures que Liz Truss a dû abandonner sous la pression des marchés et de son propre camp.
"Comment peut-elle être tenue pour responsable quand elle n'est pas aux commandes ?", a encore cinglé Keir Starmer.
La crise remonte à la présentation fin septembre du "mini-budget" de son ministre des Finances d'alors, Kwasi Kwarteng, qui avait fait craindre un dérapage des comptes publics.
La livre avait chuté à un plus bas historique et les taux d'emprunt à long terme de l'État avaient flambé. La Banque d'Angleterre avait dû intervenir pour empêcher la situation de dégénérer en crise financière.
Pour tenter de calmer la tempête économique et politique, Liz Truss a dû nommer un nouveau ministre des Finances, Jeremy Hunt, chargé de rectifier son programme économique et de rassurer les marchés sur le sérieux budgétaire du gouvernement.
Ce dernier, désormais largement considéré comme ayant pris l'ascendant sur Truss, est revenu sur presque toutes les baisses d'impôts promises par la Première ministre et prévenu qu'il faudrait faire des économies dans les dépenses publiques, faisant redouter le retour à l'austérité, comme après la crise financière de 2008.
Envolée des prix
Au moment où l'inflation a atteint un sommet en 40 ans à 10,1 % en septembre, la Première ministre a toutefois voulu faire taire les rumeurs qui laissaient penser qu'elle n'augmenterait pas comme promis les pensions de retraite à hauteur de l'inflation.
"Ce gouvernement donne la priorité aux plus vulnérables tout en apportant de la stabilité économique et en menant vers une croissance de long terme souhaitée par tous", avait déjà voulu rassurer mercredi matin Jeremy Hunt, réagissant au nouveau pic d'inflation.
Si la situation politique reste toujours chaotique, cette reprise en main économique a semblé rassurer les marchés et le Fonds monétaire international, qui a salué le retour à la "discipline budgétaire", au moment où la récession guette.
Mais les mouvements sociaux continuent de se multiplier. Et dans l'opinion, selon un sondage YouGov, seul un Britannique sur dix a une opinion favorable de Liz Truss, un sur cinq chez les électeurs du parti conservateur. Et 55 % des membres du parti majoritaire estiment que Liz Truss devrait démissionner alors que 38 % souhaitent qu'elle reste en poste.
À deux ans des prochaines élections parlementaires, l'opposition travailliste terrasse les conservateurs dans les sondages.
Cinq députés de son parti ont déjà publiquement exhorté Liz Truss à partir. Faute de successeur évident, les conservateurs sont toutefois réticents à s'engager dans un nouveau et long processus de désignation et sont à la recherche d'un consensus pour s'accorder sur un nom, mais semblent loin d'y parvenir.
"Je ne crois vraiment pas que nous lancer dans une nouvelle campagne, nous débarrasser d'un autre Premier ministre, convaincra les Britanniques que nous pensons à eux plutôt qu'à nous, ni convaincra les marchés de rester calmes", a prévenu, mercredi, le ministre des Affaires étrangères James Cleverly sur Sky News.
France 24 avec AFP