Le parti républicain a reconduit sa présidente Ronna McDaniel vendredi en Californie, lors d'une réunion qui a une fois de plus souligné les profondes divisions qui minent le camp conservateur avant l'élection présidentielle de 2024.
Aux commandes depuis 2016, cette proche de Donald Trump a été réélue pour un quatrième mandat avec 111 votes sur 167 exprimés, lors du comité national du parti à Dana Point en Californie.
Avec une victoire dès le premier tour, elle s'est épargnée l'humiliation vécue par Kevin McCarthy début janvier, forcé d'accorder d'importantes concessions à la frange la plus dure du parti pour accéder au poste de "speaker" au Congrès, après 14 votes successifs.
Mais ce scrutin n'en a pas moins révélé les fractures du "Grand Old Party" (GOP), échaudé par sa contre-performance lors des élections de mi-mandat en novembre, où il n'a gagné qu'une fragile majorité à la Chambre des représentants et a échoué à reconquérir le Sénat.
Lesté par les ennuis judiciaires, Donald Trump a déjà déclaré sa candidature pour reconquérir la Maison Blanche en 2024, mais sa mainmise sur le parti est de plus en plus contestée. Les candidats qu'il a soutenus en novembre ont pour la plupart échoué à se faire élire, transformant l'ex-président et son goût immodéré pour la provocation en "machine à perdre" aux yeux de beaucoup.
Sa protégée Ronna McDaniel avait jusqu'ici toujours été réélue sans aucune opposition. Mais cette fois-ci, elle a dû se défaire d'Harmeet Dhillon, une avocate qui a récolté 51 voix en capitalisant sur l'amertume de nombreux républicains afin de forger une alliance inattendue.
Ses appels au changement ont à la fois séduit les trumpistes les plus extrêmes et ceux qui cherchent une alternative à M. Trump. A la veille du vote à bulletin secret, le gouverneur de Floride Ron DeSantis, dont les ambitions présidentielles ne font guère de doute, s'est ainsi prononcé en sa faveur.
"Je crois que nous avons besoin d'un changement. Je pense que nous avons besoin de sang neuf au sein du comité national républicain", a confié au média Florida's Voice ce conservateur pur jus, triomphalement réélu en novembre.
Union de façade
Loin de la pagaille étalée aux yeux de tous au Congrès début janvier, Ronna McDaniel a tenté de resouder son parti après sa victoire. Elle a fait monter sur scène Mme Dhillon et son autre rival, l'entrepreneur complotiste Mike Lindell, qui a récolté 4 voix.
"Avec nous tous unis, les démocrates vont nous entendre en 2024", s'est-elle réjouie, immédiatement félicitée par Donald Trump sur les réseaux sociaux.
Avant le vote, elle avait mis en garde contre les divisions de son camp. "Rien de ce que nous faisons n'est plus important que de s'assurer que Joe Biden n'ait qu'un seul mandat comme président", avait-elle insisté. "Mais pour cela, nous avons besoin d'être unis".
Un voeu qui risque fort de s'avérer pieux. Dans les couloirs du luxueux hôtel où se déroulait le comité, Mme Dhillon a insisté sur le soutien populaire dont elle bénéficiait et a accusé l'organe d'aveuglement.
"Personne ne va s'unir derrière un parti qui ignore sa base", a-t-elle fustigé devant la presse, en accusant l'establishment du GOP et les conseillers de M. Trump d'avoir faussé l'élection en mettant toutes les ressources du parti au service de Mme McDaniel. "Je pense que le parti va devoir gérer les retombées de cette déconnexion avec la base."
Les membres du comité "n'ont pas écouté ce que le peuple voulait", a abondé M. Lindell, l'autre perdant, auprès de l'AFP.
Plus qu'un soutien à M. Trump, la réélection de Mme McDaniel sonne comme un moyen de "bloquer la frange la plus extrême du parti de prendre le contrôle" du GOP qui soutenait Mme Dhillon, analyse pour l'AFP la politologue Wendy Schiller.
Selon elle, cette élection d'habitude peu passionnante s'est transformée en "bataille par procuration" entre Donald Trump et Ron DeSantis. De quoi souligner le malaise persistant chez des conservateurs en plein doute.
"Au niveau national, pour remporter les élections ce parti est vraiment en train de se fragmenter et de se désagréger."
Sources: Le Point avec AFP