L’un des cinq membres permanents du Conseil de sécurité, la Fédération de Russie, a présenté cet après-midi au Conseil de sécurité un projet de résolution humanitaire relatif à l’Ukraine qui n’a pas été adopté, 13 membres s’étant abstenus. Le texte a en effet suscité des réserves, parce qu’il ne faisait pas mention de la cessation des hostilités, et des critiques indignées de membres accusant la Russie d’avoir enclenché le conflit même dont son projet fait l’objet, rendant cette initiative « hypocrite » et « honteuse ». La Chine, avec la Russie, ont été les seuls membres à voter en faveur du texte.
Le projet appelait entre autres à un « cessez-le-feu négocié » pour permettre l’évacuation sûre, rapide, volontaire et sans entrave de tous les civils. Il demandait à faire en sorte que le personnel et le matériel humanitaires puissent circuler sans entrave et en toute sécurité, et à permettre aux populations civiles de sortir du pays sans encombre.
Parmi les réactions les plus vives, l’Irlande a qualifié le texte de « détournement cynique du système multilatéral par l’agresseur dans cette guerre ». Pour la France, il constitue une manœuvre russe pour légitimer son agression: la Russie chercherait à imposer des « réalités alternatives », à « instrumentaliser » le Conseil et à obtenir un blanc-seing pour poursuivre sa guerre. Même ton de l’Albanie pour qui, « si la Russie est soucieuse de sa responsabilité de protéger, elle doit cesser cette agression et rentrer chez elle ».
Un des arguments les plus saillants avancés par les membres du Conseil est l’absence de neutralité de la Russie, qui est à la fois « agresseur » et auteur du projet. Comme l’a résumé la Norvège, une partie à un conflit ne peut s’attendre ni à être perçue comme neutre devant le Conseil, ni être l’auteur de projets de textes, ni participer à un vote relatif à un conflit auquel elle est partie. Or « personne ne peut douter du statut de la Russie en tant que partie » au conflit pour la délégation norvégienne, qui a remarqué que, réunion après réunion, la Russie attend « que nous acceptions ses récits, rapports et opinions comme s’ils venaient d’une partie neutre ».
La Fédération de Russie a répondu pied à pied, retournant les reproches émis, qu’il s’agisse d’instrumentalisation du Conseil ou de diffusion de fausses nouvelles. Prenant à parti les membres occidentaux du Conseil, elle les a accusés « d’instrumentaliser » le droit humanitaire, tout en énumérant les bienfaits qu’aurait amené son projet avorté: « cessez-le-feu », « mise en place d’un couloir humanitaire », « traitement humain des prisonniers de guerre », entre autres. Son projet, qu’elle affirme de bonne foi, aurait aidé à soulager les souffrances du peuple ukrainien, peuple utilisé comme « bouclier humain » par les dirigeants de Kiev, qui abriteraient, toujours selon la Russie, des armes lourdes dans des hôpitaux et des crèches.