De nouvelles manifestations contre l'armée au pouvoir ont eu lieu, jeudi, au Soudan, durant lesquelles un protestataire a été tué "d'une balle au ventre" par les forces de sécurité. Tandis que pour la première fois, la police a annoncé la mort d'un de ses généraux dans un défilé à Khartoum. Un évènement qui fait craindre une nouvelle flambée de violence malgré le lancement, lundi, d'un dialogue indirecte avec les parties civile et militaire soudanaises sous l'égide de l'ONU.
Un manifestant anti-putsch et un général de police ont été tués jeudi lors de nouvelles manifestations à Khartoum contre le coup d'État, faisant redouter une nouvelle flambée de violence dans le pays quelques jours après le lancement d'un dialogue sous l'égide de l'ONU.
Le 25 octobre, le chef des autorités de transition, le général Abdel Fattah al-Burhane, menait un coup d'État. Depuis, la rue ne cesse de le conspuer. Et les forces de sécurité de réprimer les manifestants, avec déjà 64 morts dans leurs rangs, selon des médecins proches des contestataires.
Le dernier en date, jeudi, a été tué "d'une balle au ventre" lors de nouvelles manifestations dans la banlieue nord de Khartoum, ont rapporté ces médecins.
Plus tôt dans l'après-midi, la police, qui fait régulièrement état de dizaines de blessés dans ses rangs, a annoncé pour la première fois la mort d'un de ses généraux. Il a été "poignardé à mort par des groupes de manifestants" à Khartoum, a précisé son porte-parole Idriss Abdallah Idriss.
Ce décès pourrait changer la donne car d'un côté les manifestants se disent pacifistes et de l'autre, les autorités accusent certains d'entre eux de chercher l'affrontement, dans un pays où des millions d'armes sont en circulation.
Arrestation de journalistes
Selon des témoins, les forces de sécurité ont tiré de nouveau jeudi des grenades lacrymogènes sur des milliers de manifestants anti-putsch à Khartoum.
En outre, la télévision al-Araby, basée à Londres, a indiqué qu'une de ses équipes avait été arrêtée alors qu'elle couvrait les manifestations. Depuis le coup d'État, le Soudan a déjà été pointé du doigt par la communauté internationale pour des arrestations et des passages à tabac de reporters.
Jeudi malgré tout, la foule scandait: "Burhane, c'est les islamistes qui t'ont amené là!".
Car pour les partisans d'un pouvoir civil au Soudan --resté sous la férule des militaires quasiment en continu depuis son indépendance il y a 66 ans--, le putsch est un moyen de revenir à l'ancien régime d'Omar el-Béchir, une dictature à la fois militaire et islamiste.
Déjà, le visage civil de la difficile transition a quitté le navire: début janvier, le Premier ministre Abdallah Hamdok a démissionné.
Et ce, alors que depuis le coup d'Etat, les généraux ne sont pas parvenus à renommer un gouvernement de civils comme ils le promettaient depuis le 25 octobre.
La rue, elle, est intraitable. Elle ne veut rien de moins que le départ du général Burhane, comme elle a obtenu en 2019 le départ de Béchir.
Entre camps irréconciliables, l'ONU tente de faire revenir tous les acteurs soudanais à la table des négociations depuis des semaines.
Lundi, son émissaire à Khartoum, Volker Perthes, a officiellement lancé une initiative pour laquelle il a indiqué vouloir favoriser dans un premier temps des entretiens individuels avant une deuxième phase de négociations directes ou indirectes.
Si Volker Perthes assure qu'il n'y a eu "aucune objection" de la part des militaires, les civils, eux, ont déjà rejeté pour nombre d'entre eux son idée.
Par France 24 avec AFP