Cap (AFP) - Le petit homme dans sa robe violette d'archevêque a une aura et un rire qui ont passé les frontières de l'Afrique du Sud. Desmond Tutu, héros de la lutte contre l'apartheid et prix Nobel de la paix, fête jeudi ses 90 ans au Cap.
Avec sa femme Leah Tutu, le premier archevêque anglican noir du pays doit assister à un service à la cathédrale St George, où il a longtemps prêché.
Une conférence en ligne avec le Dalaï Lama, l'ancienne présidente de l'Irlande Mary Robinson, la militante des droits de l'Homme Graça Machel et l'ex médiatrice sud-africaine Thuli Madonsela qui a dénoncé la corruption d'Etat, est aussi organisée par sa fondation.
Soulignant son "honnêteté, intégrité, intrépidité", le président sud-africain Cyril Ramaphosa a présenté ses voeux dans un communiqué: "Pendant près de trois décennies, vous avez été une voix de la conscience, nous guidant et nous poussant à faire mieux pour notre peuple".
"Un déluge d'amour et de bons vœux de la part d'individus et d'organisations du monde entier s'est déversé sur Le Cap à l'approche du 90e anniversaire de l'archevêque Desmond Tutu", a remercié dans un communiqué le Tutu Trust.
- "Arc-en-ciel" -
Voix des Sud-Africains noirs en lutte contre le régime raciste blanc chassé par la démocratie il y a près de 30 ans, Desmond Tutu s'est peu exprimé publiquement ces dernières années. Le vieil homme souffre d'un cancer de la prostate depuis plus de vingt ans, il avait été hospitalisé en 2019 pour une infection.
Retraité depuis 2010, sa dernière apparition publique date de mai lors de sa vaccination contre le Covid. En chaise roulante, il a souri et salué de loin, sans s'adresser aux journalistes.
Infatigable défenseur des droits humains et proche de l'icône Nelson Mandela, premier président noir d'Afrique du Sud, il a reçu un Nobel en 1984 pour son engagement contre l'apartheid aboli en 1994.
L'influence de Tutu au sein des institutions anglicanes l'a mené vers une démarche de réconciliation. Il a baptisé son pays la "nation arc-en-ciel", intimement convaincu que l'expérience sud-africaine pouvait aider le reste du monde à comprendre comment surmonter les conflits.
Mais son obsession du pardon est dénoncée par une nouvelle génération de Sud-Africains. Pour eux, la population noire a fait trop de concessions dans la transition vers la démocratie et n'a pas suffisamment réclamé de comptes.
Mais chacun reconnaît à Tutu d'avoir continué à dénoncer défaillances et injustices: il s'est attaqué à l'homophobie, a défié Mandela sur la générosité du salaire de ses ministres et vivement critiqué la corruption endémique sous la présidence de Jacob Zuma.
AFP